Les représentants communautaires mettent en avant leurs points de vue locaux sur l’environnement lors des ateliers de consultation sur les rapports EEM.
Les 28 et 29 septembre 2020, dans le cadre du projet de Gestion intégrée de la zone marine et côtière d’Abidjan à Assinie (GIAMAA), la Côte d’Ivoire a validé son rapport sur l’état du milieu marin (REEM) dans le pays, à la suite de deux réunions, tenues respectivement à Assinie et à San Pedro. Ces deux ateliers consultatifs ont permis aux communautés côtières locales de s’exprimer par l’intermédiaire de représentants choisis. Les représentants des communautés mettent en avant leurs préoccupations environnementales lors des ateliers de consultation sur le REEM.
À Assinie, M. Justin Soppy Tchapka, chef de village des Grand-Jacques, a assisté à la réunion afin de mettre en évidence certains des principaux problèmes qu’il a observé dans la zone côtière – des problèmes qu’il a qualifié de « problèmes existentiels ». En effet, dans cette zone, les explosifs utilisés pour développer les infrastructures maritimes d’extraction du pétrole (par exemple les plateformes offshore) affectent l’écosystème marin, et ont donc un impact direct sur le secteur de la pêche artisanale. En outre, les résidus de pétrole envahissent le littoral et ont un impact écologique et esthétique sur la zone, affectant ainsi les ressources et le bien-être des communautés côtières.
L’exploitation du sable est un autre problème mentionné par M. Tchapka, car elle accélère l’érosion côtière. À mesure que la mer gagne du terrain sur la terre, elle emporte les derniers palmiers de la côte, qui contribuent à prévenir l’érosion côtière. L’extraction du sable augmente donc la boucle de rétroaction positive de l’érosion côtière dans la région. L’érosion côtière est un problème vital pour les villageois de Grand-Jacques, car le village est situé sur une portion de terre entre l’océan au sud et la lagune Ébrié au nord. Comme le craint le chef, « si rien n’est fait, des vies humaines seront un jour perdues ici ». M. Tchapka a donc appelé à un projet d’action et de replantation de palmiers le long de la côte, afin de ralentir la progression de l’océan sur la terre ferme. La migration pour les villageois de Grand-Jacques n’est en effet pas une option, a déclaré M. Tchapka, avant de souligner, « la préservation de l’environnement signifie tout pour nous, car si l’environnement est détruit, nous n’existons plus ».
À San Pedro, M. Raphaël N’Drin Bogui, chef des chefs de village du département de Fresco, a commencé par préciser : « Il n’y a aucune raison pour que cet atelier sur le littoral se déroule sans moi ». Tout comme M. Tchapka lors de la réunion d’Assinie, M. N’Drin Bogui a souligné la question de l’élévation du niveau de la mer. « L’élévation du niveau de la mer est un danger pour nous, en particulier pour la population vivant sur la bande côtière ». En effet, en 1963, déjà en raison de son exposition à l’élévation du niveau de la mer, le village de Fresco a dû être déplacé de la plage vers le continent, derrière la lagune de Gbôkle. Le village surplombe désormais celle-ci.
En ce qui concerne la sécurité alimentaire, M. Marcel Otté Kouadio, chef de Gaoulou, un village situé à 14 km de l’océan mais le long du fleuve Sassandra, a souligné : « Dans la mer, il y a presque tout ce qui nourrit les hommes ». En outre, dans la rivière dont son village dépend, M. Otté Kouadio a déclaré avoir observé une diminution des poissons, tant en termes de quantité que de diversité des espèces. Il a établi un lien direct avec la déforestation des mangroves qui, outre empêcher l’érosion côtière, constituent une importante zone de nurserie pour les poissons. Reflétant les liens étroits de sa communauté avec ces arbres et les services écosystémiques qu’ils fournissent, il questionne, « Ces arbres nous donnent la vie, pourquoi allons-nous les détruire ? », et a demandé à ce que des activités de restauration soient entreprises à proximité de son village.
Louis PILLE-SCHNEIDER
Images: Alison Amoussou (Secrétariat de la Convention d’Abidjan)