Le Bénin continue de développer ses capacités en matière de planification spatiale marine et d’aires marines protégées
Dans le cadre de la mise en œuvre du projet de Gestion Intégrée des Zones Marines et Côtières (GIZMaC), le Ministère béninois de l’environnement et du développement durable (MCVDD) a organisé deux ateliers de travail pour finaliser son plan de travail stratégique de planification spatiale marine.
Du 14 au 17 octobre 2019, des acteurs de la société civile, du secteur privé et des instances gouvernementales impliquées dans la gestion de la zone marine et côtière au Bénin se sont réunis à Cotonou pour un atelier de développement de capacités sur la planification spatiale marine (PSM), un composant essentiel de la Gestion Intégrée des Océans. Le 17, le Réseau Régional d’Aires Marines Protégées en Afrique de l’Ouest (RAMPAO) s’est joint aux participants pour suivre le processus de PSM et commencer à travailler à la création d’une Aire Marine Protégée (AMP).
L’objectif général du premier atelier était d’évaluer le travail initié par le Bénin, l’adoption du plan de travail de PSM, et l’identification de potentiels sites d’application. L’atelier a ainsi poursuivi les travaux préliminaires de PSM qui avaient débuté plus tôt dans l’année. Il visait spécifiquement à finaliser les plans de travail stratégiques délimitant le champ d’application de la PSM et à élargir les équipes nationales de MSP en incluant d’autres secteurs représentés dans la zone concernée. Le deuxième atelier s’est quant à lui concentré sur le processus de création d’une AMP, et a bénéficié de la présence du RAMPAO, venu partager son expertise sur le sujet.
Les deux ateliers ont chaleureusement été accueillis par M. Martin Pépin Aina, Directeur général de la Division de l’Environnement et du Climat au sein du MCVDD, qui les a jugés essentiels pour améliorer la gestion de l’environnement au Bénin. M. Aina a ainsi déclaré: « Commencer tôt à rassembler différents acteurs autour d’une même table est le meilleur moyen de développer des synergies durables et une bonne cohésion. Il serait fortement bénéfique pour le Bénin de disposer de praticiens bien formés à la PSM pour la gestion de ses ressources côtières et marines dans le futur proche ».
Mme Dieynaba Seck, du Centre de Suivi Écologique (CSE) du Sénégal – Centre d’expertise en charge du développement des capacités en matière de zones marines d’importance écologique ou biologique (ZIEB) dans les trois pays pilotes Mami Wata – a souligné l’importance de la PSM pour le Bénin : « Cette approche est particulièrement pertinente pour le Bénin, le pays souhaitant renforcer son développement en promouvant l’économie bleue. Ceci nécessitera en effet un meilleur cadre réglementaire pour les multiples activités qui se déroulent dans l’espace marin, notamment pour assurer la conservation de la biodiversité ».
Le rôle que la PSM peut jouer pour une pêche plus durable a également été abordé. À cet égard, M. Akuete Assevi, chef de district d’Avlo (municipalité de Grand Popo), a rappelé aux participants de l’atelier que l’exploitation des ressources océaniques constitue la principale ressource de la population côtière du Bénin. « L’épuisement des ressources halieutiques amène de plus en plus les pêcheurs béninois à émigrer vers d’autres pays côtiers de la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, tels que la Côte d’Ivoire, le Gabon ou la Mauritanie, afin de préserver leurs moyens de subsistance. Grand Popo fournit de ce fait de nombreux pêcheurs aux pays voisins », a regretté M. Assevi. La gestion durable des ressources côtières et marines du pays bénéficierait ainsi grandement aux pêcheurs, y compris aux communautés de Grand Popo. D’autre part, M. Eric Agbessi, de la Direction de l’Environnement du Togo, a souligné l’importance de penser au-delà de la seule création d’AMP – thème central du second atelier – et d’envisager les usages de l’espace marin et les activités en son sein d’une manière holistique. M. Agbessi a en outre souligné la nécessité de planifier la conservation dans les pays d’Afrique de l’Ouest tout en garantissant le développement socio-économique.
Le développement actuel de mesures de gestion intégrée des zones marines et côtières par le projet GIZMaC au Bénin constitue la suite logique de l’identification et de la description récentes de deux ZIEB et de l’atelier sur le rapport sur l’état de l’environnement marin du mois dernier. La création d’AMP au Bénin constitue la prochaine étape importante du projet GIZMAC. À cet égard, M. Christian Adje, du Centre de Recherches Halieutiques et Océanologiques du Bénin, a présenté les cinq étapes prévues dans le processus de développement des AMP du Bénin: (i) une identification et une description participatives des ZIEB; (ii) une étude des sites identifiés avec la participation des communautés locales; (iii) des études écologiques et socio-économiques et une mise à jour des informations scientifiques existantes; (iv) l’élaboration participative d’un plan de gestion et de réglementations; (v) l’instauration officielle et la désignation de la structure de gestion technique. Dans ce processus de développement des AMP, le Bénin travaille actuellement à la deuxième étape.

Avec la participation du RAMPAO au second atelier, des séances spécifiques ont été consacrées à la protection et à la conservation des ressources marines et côtières, aux processus de création et de gestion des sites, et aux défis et opportunités existants. Les séances avec le RAMPAO ont également été une occasion d’en apprendre davantage sur le réseau, son objectif et les moyens d’y adhérer.
Mme Marie Suzanne Traoré, secrétaire générale du RAMPAO, a expliqué: « L’objectif général du RAMPAO est de fournir un soutien à ses membres – les AMP d’Afrique de l’Ouest, de la Mauritanie à la Sierra Leone. Cependant, le RAMPAO envisage actuellement une extension de son réseau aux autres pays d’Afrique de l’Ouest ». Mme Traoré a ajouté: « Nous sommes ici pour soutenir les autorités béninoises et partager notre expérience en tant que réseau d’AMP, ainsi que pour permettre aux gestionnaires du Bénin de bénéficier de notre expertise. (…) À mesure que le processus de développement des AMP avance, nous espérons également que le rôle technique de la Convention d’Abidjan pourra être progressivement transféré au RAMPAO ».
Un autre aspect essentiel abordé autour de la création d’AMP, est l’importance des sites culturels ou touristiques. M. Pierre Yaï Chabi, chercheur associé au ministère du Tourisme, de la Culture et des Arts du Bénin et point focal de l’UNESCO, a participé à l’atelier afin d’aider l’équipe de coordination du GIZMaC à identifier ces sites potentiels, où les connaissances traditionnelles tiennent un rôle clé dans la gestion durable des ressources en jeu. M. Yaï Chabi a rappelé aux participants qu’il était nécessaire de prendre en compte toutes les logiques (souvent contradictoires) des acteurs – conservation pour certains, consommation pour d’autres – avant d’aborder la mission de transmission de connaissances du Ministère, en mettant l’accent sur le patrimoine subaquatique du Bénin. En effet, plusieurs épaves de navires gisent dans les eaux côtières béninoises, notamment à Donaten et dans les Bouches du Roy. En effet, ce dernier site est proche de Ouidah, qui était autrefois un quai d’embarquement pour les esclaves envoyés d’Afrique en Amérique – aussi connu sous le nom de « Porte du Non-Retour ». Ainsi, cartographiés par des plongeurs et pêcheurs locaux, de nombreux naufrages dans la région remontent à cette époque et sont directement liés à la traite négrière transatlantique.
La biodiversité marine du Bénin est également soumise à l’écotourisme. M. Yaï Chabi, a par exemple évoqué l’ONG Nature Tropicale (qui collabore étroitement avec le projet GIZMaC sur les actions de conservation, visant particulièrement les tortues de mer) et son programme d’écotourisme, qui offre aux touristes des opportunités pour l’observation des baleines et la découverte des zones humides du Bénin. M. Yaï Chabi a enfin souligné combien il était essentiel que les futures AMP englobent ces différents facteurs écologiques, culturels et économiques.
Concernant ce dernier aspect, M. Maxime F. Ahoyo, Préfet Maritime du Bénin, a souligné l’importance pour tous les acteurs de pouvoir mener leurs activités sans nuire ni être affectés par d’autres activités menées dans les zones côtières et marines. Une sensibilisation accrue, une meilleure communication et une attribution concertée des zones d’activités devraient permettre de réduire les conflits d’usage, et rendre l’océan le long du littoral béninois un espace plus sûr.
Louis PILLE-SCHNEIDER
Photographies: Alison Amoussou (Convention d’Abidjan)